L’asthme est une maladie chronique qui se caractérise par une inflammation des voies respiratoires. De plus en plus fréquente, elle est la première maladie chronique chez l’enfant, avec une prévalence de 8 à 10%. Même si les premiers signes peuvent être discrets, une crise d’asthme se manifeste souvent par une respiration sifflante, des difficultés à respirer, des essoufflements… avec des formes aigues qui peuvent être graves. Les patients atteints d’asthme ont souvent une prédisposition génétique favorisant les réactions allergiques, induites ou exacerbées par certains facteurs environnementaux tels que le pollen ou les acariens. L’utilisation d’huiles essentielles chez les personnes asthmatiques doit se faire avec beaucoup de précautions. En effet, ce sont des sujets sensibles, puisque les molécules volatiles contenues dans les huiles essentielles peuvent irriter leurs voies respiratoires et donc aggraver leur état. C’est pourquoi, les voies olfactives (inhalation et diffusion) sont à proscrire. Ainsi, certaines huiles essentielles sont contre-indiquées, comme l’huile essentielle d’Eucalyptus Radiata. Cependant, d’autres huiles, bien tolérées par les asthmatiques, peuvent être utilisées pour prévenir les crises.

Cet article a été mis à jour le 14/06/2023

Pourquoi faut-il l’éviter chez les personnes asthmatiques ?

Chez les personnes asthmatiques, les bronches ont développé une hyper-réactivité (déclenchée par le froid, le sport, la présence d’allergène…). Lorsqu’elles se sentent agressées, elles vont se contracter (bronchoconstriction) et produire du mucus en excès, gênant le passage de l’air, ce qui déclenchera la crise d’asthme. Respirer devient fatigant et demande un effort supplémentaire. Le traitement de l’asthme consiste généralement à inhaler une substance bronchodilatatrice lorsqu’une crise survient, associé à un traitement anti-inflammatoire afin de soulager l’inflammation excessive ou inappropriée des voies respiratoires.

Connue pour ses propriétés anti-inflammatoires et mucolytiques, l’huile essentielle d’Eucalyptus Radiata n’est cependant pas celle à utiliser contre l’asthme. En effet, cette huile contient majoritairement de l’eucalyptol (1,8-cinéole), à environ 70%. Or, certains auteurs déconseillent l’utilisation d’huiles essentielles avec plus de 60% d’eucalyptol car cette molécule peut, chez certaines personnes sensibles, être à l’origine d’une crise d’asthme. De ce fait, la volatilité de cette molécule peut irriter les voies respiratoires de la personne asthmatique et agresser ses bronches fragilisées, déclenchant les symptômes de l’asthme. Toutefois, il semble que l’eucalyptol ne soit pas la seule molécule contenue dans l’huile essentielle d’eucalyptus Radiata qui soit agressive pour les voies respiratoires. En effet, des expérimentations sur souris ont montré que les irritations respiratoires peuvent être également induites par l’oxydation de l’alpha-pinène (présent à 5% dans l’huile essentielle d’Eucalyptus Radiata). Les bronches du sujet asthmatique étant hyper-réactives, ce sont les irritations induites par ces deux composés (eucalyptol et alpha-pinène) après inhalation qui risquent de déclencher la crise asthmatique chez certaines personnes. Par ailleurs, l’alpha-pinène est aussi un allergisant potentiel, surtout sous sa forme oxydée : il est donc déconseillé aux personnes présentant un terrain allergique. C’est pourquoi, bien que l’huile essentielle d’Eucalyptus Radiata soit la référence pour soulager les problématiques ORL, elle est à éviter en cas d’asthme, surtout par inhalation ou diffusion.

Des études prometteuses sur l’Eucalyptol

Alors que l’utilisation de l’huile essentielle d’Eucalyptus Radiata est déconseillée chez les personnes asthmatiques à cause de sa forte teneur en eucalyptol, ce composé a fait l’objet de plusieurs études dans le traitement de l’asthme. Toutefois, les résultats encourageants obtenus ne sont pas transposables à l’huile essentielle d’Eucalyptus Radiata. En effet, celle-ci est composée de diverses molécules qui forment le totum de l’huile essentielle. Elle contient divers terpènes, y compris des composés particulièrement oxydables comme l’alpha-pinène. Ainsi, il se pourrait que les potentiels effets négatifs de l'huile essentielle d’Eucalyptus Radiata chez les personnes asthmatiques soient aussi liés aux interactions entre les autres composés volatils de l’huile essentielle. Par conséquent, les bénéfices étudiés du 1,8-cinéole pur dans le traitement de l’asthme ne sont pas comparables aux effets de l’huile essentielle d’Eucalyptus Radiata, même s’il est le composé majoritaire. De plus, les divers essais cliniques utilisaient des gélules d’eucalyptol par voie orale, ce qui est différent de l'inhalation, que ce soit en terme de mode d'action, de précautions à prendre et de risques d'utilisation.

Propriété anti-inflammatoire

L’asthme est associé à un processus inflammatoire, déclenché dans l’organisme par plusieurs médiateurs tels que le TNF-α ou l’interleukine-1β. Ces molécules ont pour rôle d’attirer les cellules de l’immunité afin de stimuler la réaction inflammatoire et, dans le cas de l’asthme, favoriser l’hypersécrétion de mucus.

L’eucalyptol pur montre des résultats encourageants dans le traitement de l’asthme pour réduire les réactions inflammatoires excessives des voies respiratoires. Deux mécanismes d’actions ont été décrits dans des études in vitro. Tout d’abord, l’eucalyptol serait capable d’inhiber la production de certaines cytokines pro-inflammatoires, et notamment le TNF-α et l’interleukine-1β, marqueurs de l'augmentation de la production de mucus et de la résistance aux stéroïdes. Ce mécanisme pourrait être attribué à la suppression du facteur de transcription Egr-1 par l’eucalyptol. Ensuite, le 1,8-cinéole empêcherait la translocation de NF-κB, un facteur de transcription impliqué dans la réponse immunitaire et le processus d’inflammation, permettant de limiter ce phénomène.

Deux essais cliniques ont permis de montrer l’activité anti-inflammatoire du 1,8-cinéole chez le sujet asthmatique. Il était soit utilisé en co-médication soit comparé avec un médicament anti-inflammatoire stéroïdien couramment utilisé dans le traitement de l’asthme. Les patients traités par l’eucalyptol présentaient une nette amélioration de la fonction pulmonaire, des symptômes de l’asthme et une réduction de la dyspnée (sensation de respiration difficile) par rapport au groupe de patients traités par placebo. Ces études ouvrent ainsi de nouvelles perspectives sur l’utilisation thérapeutique de l’eucalyptol pur par voie orale dans les maladies des voies respiratoires comme l’asthme.

Propriété antihistaminique

Dans de nombreux cas, l’asthme est déclenché par une réaction allergique. Lors du premier contact avec l’allergène, l’organisme va produire des cellules mémoires, qui vont reconnaitre la substance lors des expositions suivantes. Chez une personne allergique, la réponse immunitaire déclenchée mène à une synthèse excessive d’IgE par les plasmocytes. Ces IgE se fixent sur d’autres cellules immunitaires, qui libèrent en réponse de l’histamine. Cette molécule est à l’origine de plusieurs symptômes de l’allergie.

Des études in vitro ont montré que le 1.8-cinéole pourrait être un antagoniste compétitif des récepteurs à histamine, supprimant ainsi la contraction des muscles des voies respiratoires induite par celle-ci. Ainsi, l’eucalyptol aurait un réel effet sur l’asthme allergique, en empêchant le rétrécissement des voies respiratoires et donc cette gêne respiratoire caractéristique.

Propriété antioxydante

Les personnes asthmatiques présentent un excès de stress oxydant, provoqué par une surproduction de radicaux libres de l’oxygène (ROS). Ces derniers sont capables de stimuler plusieurs mécanismes impliqués dans l’asthme : la libération de molécules favorisant l’inflammation, l’hypersécrétion de mucus, la bronchoconstriction ou bien encore l’activation de NFκB. C’est pourquoi, les propriétés antioxydantes de l’eucalyptol semblent intéressantes. Dans des études in vitro, le 1,8-cinéole, associé à un corticoïde, a permis d’inhiber significativement la production des ROS.

Autres huiles essentielles utilisables en accompagnement de l’asthme

Par précaution, l’huile essentielle d’Eucalyptus Radiata est toujours contre-indiquée en cas d’asthme, mais d’autres huiles essentielles peuvent être utilisées en prévention. Attention toutefois, les huiles essentielles en général ne doivent pas être inhalées chez les personnes asthmatiques, pour éviter l’irritation des voies respiratoires. On privilégiera une application cutanée (sur le dos et/ou la plante des pieds), en évitant la poitrine. A noter que les alternatives naturelles telles que les huiles essentielles interviennent seulement en prévention ou en complément, mais ne doivent en aucun cas se substituer au traitement médical de l’asthme. Par ailleurs, des symptômes importants doivent faire l’objet d’une consultation médicale sans tarder.

  • Très bien tolérée, l’huile essentielle de Khella peut être indiquée pour faciliter la respiration en cas d’asthme. En effet, son action bronchodilatatrice permet la relaxation des muscles bronchiques et limite les spasmes.
  • Pour prévenir un asthme d’origine allergique, l’huile essentielle d’Estragon sera un véritable allié : elle contient de l’estragol en forte concentration, reconnu pour ses propriétés antihistaminiques.
  • Enfin, l’huile essentielle Petit Grain Bigarade n’agit pas sur les symptômes de l’asthme, mais peut aider à gérer le stress, élément parfois déclencheur ou amplificateur de l’asthme.

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À propos de ces conseils

Cet article d'aromathérapie a été rédigé par Théophane de la Charie, auteur du livre "Se soigner par les huiles essentielles", accompagné d'une équipe pluridisciplinaire composée de pharmaciens, de biochimistes et d'agronomes. 

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