Tout ceux qui l'ont essayé vous le diront : les argiles sont des remèdes naturels très polyvalents ! Que ce soit pour soulager une tendinite en cataplasme, nettoyer une plaie, combattre une gastralgie par voie orale ou bien se faire une petite beauté avec un masque… les argiles ça marche, ça court même. Mais d'où viennent les multiples propriétés des argiles ? Quels sont les mécanismes qui les rendent si puissantes ? Comment agissent-elles sur l'organisme ? Et quelles propriétés majeures nous offrent-elles ?

Cet article a été mis à jour le 14/12/2023

Les argiles, d'où viennent-elles ?

Roche, minéral, qu’en est-il pour les argiles ?

Dans notre langage courant, lorsque l’on parle d’argile, on pense tout de suite à cette terre ou cette roche à l’aspect collant et malléable, tel de la pâte à modeler, au contact avec de l’eau…

Si on examine de plus près ces roches au microscope, on pourra distinguer les constituants de la roche c’est-à-dire les minéraux argileux. Ils sont invisibles à l’oeil nu et même à la loupe mais ces minéraux contenus dans les roches argileuses sont appelés “phyllosilicates” en référence à leur organisation en feuillets, du grec phyllon, et à leur composition en silice. A l’oeil nu ils s’organisent alors en lamelles superposées. Ce sont ces minéraux qui confèrent à la roche ses propriétés si particulières…

Par abus de langage, on parle d’argiles mais gardez en tête que ce sont bien les minéraux argileux qui nous intéressent !

Les argiles, ces constituants majoritaires de notre sol…

Les argiles sont produites en permanence par la Terre. Notre Terre, et particulièrement son écorce, a connu de véritables évolutions formant au fil du temps divers minéraux. Parmi eux, les plus connus et retrouvés en abondance sont le feldspath (60 %), le groupe magnésium-fer (17 %), le quartz (12 %), ou encore les micas (4 %) pour ne citer que les plus connus. Via des procédés mécaniques mais aussi chimiques, ces roches qui composent la croûte terrestre produisent des argiles. Mais comment ?

L’altération des roches, aussi appelée érosion, peut être dûe à l’action mécanique du vent ou de l’eau et même de la température. Les phénomènes de gel et de dégel désintègrent les roches en les fractionnant petit à petit en particules. De plus, l’eau de pluie parfois acide, provoque un remaniement de la roche via des réactions chimiques.

Ainsi, les conditions météorologiques entraînent l’érosion de la roche éruptive, particulièrement des feldspaths, créant ainsi une roche sédimentaire dont font partie nos fameuses argiles ! On les retrouve de nos jours sous forme de gisements, plus ou moins étendus et de couleurs bien différentes... En témoigne par exemple la montagne Winikunka, aussi appelée montagne arc-en-ciel, que l'on retrouve au coeur de la Cordillère des Andes au Pérou.

Les argiles sont véritablement des témoins de l’évolution de la croûte terrestre...

La composition et la classification des argiles

On parle souvent d’argile… Mais faut-il parler de l’argile ou bien des argiles ?

Sous ce terme général d’argile, souvent employé, se cache en réalité une famille nombreuse…
L’argile, ou devrais-je dire l’ensemble des argiles, sont des roches sédimentaires terreuses issues de la décomposition d’espèces minérales. Elles sont toutes composées de silicates d’alumine sur lesquels se sont greffés des minéraux provenant de l’environnement. La différente composition de ces derniers offre aux argiles leur variété de couleurs !
Blanche, Verte, Rouge et même Bleue… elles nous font rêver en couleurs !

3 familles d'argiles structurales

Composées majoritairement de silicates d’alumine, les argiles présentent tout de même de sacrées différences pour arriver à leur couleur respective…

En fonction des minéraux qu’elle possède mais également de sa structure en feuillets, l’argile se range dans une famille argileuse bien particulière. La conformation des minéraux se fait sous forme de feuillets de l’ordre du nanomètre. Imaginez qu’au microscope vous pourriez distinguer différentes couches de lamelles superposées… La composition de ces feuillets, leur épaisseur, leur structure définissent la famille argileuse et plus précisément le type d’argile auquel nous avons à faire.

N’oublions pas que les argiles sont majoritairement composées de silicates d’alumine… Ainsi, les feuillets sont formés de deux types de couches, soit elles sont constituées de silice (SiO4), soit elles sont composées d’alumine (Al2O3). Dans le premier cas, la silice et l’oxygène (O) forment un tétraèdre, c'est-à-dire un volume à 4 faces. Dans le second cas, des octaèdres à 8 faces sont composés d’alumine en leur centre, d’hydroxyle (H) et d’oxygène dans les angles. Outre ces couches formant des feuillets, la structure argileuse s’entrecoupe d’espaces interfoliaires qui comme leur nom l’indique, sont les espaces entre séparant les feuillets.

Les terres argileuses se répartissent alors en trois familles structurales :

  • la famille 1:1 correspondant à une couche tétraédrique surplombant une couche octaédrique. Cette disposition se répète ainsi… On parle ici plus clairement des kaolinites notamment.

  • la famille 2:1, ici une couche octaédrique est littéralement prise en sandwich entre deux couches tétraédriques comme c'est le cas pour l'illite, le glauconite ou le montmorillonite par exemple. Des cas particuliers existent dans cette famille, si l’aluminium est remplacé par un autre atome, comme c’est le cas pour le talc, ou selon la composition de l’espace interfoliaire.

  • la famille  2:1:1, ces argiles sont constituées de deux feuillets tétraédriques encadrant une couche octaédrique mais dans ce cas l'espace interfoliaire, c’est-à-dire l’espace entrecoupant les feuillets, est rempli par un feuillet octaédrique. La chlorite a cette conformation par exemple.

Ces différences de structures et d’épaisseur, vont notamment avoir un rôle sur la cohésion entre les feuillets, la stabilité de l’argile et sa capacité à se gonfler d’eau. Par exemple la kaolinite gonfle moins que la montmorillonite car cette dernière connaît une désorganisation dans l’empilement de ses feuillets facilitant leur écartement ; l’eau peut plus facilement se loger dans les espaces “vides”.

Légende

Une mesure par rayons X de la structure des argiles

La structure d’une argile se mesure grâce à une méthode utilisant la diffraction des rayons X. Késako ?

Cette technique est basée sur la diffraction des rayons X par la matière traversée. Un faisceau de rayons X rencontre une matière, ici l’argile, qui dévie les rayons de leur trajectoire initiale. Cette déviation varie en fonction de l’épaisseur de la structure argileuse, du nombres de feuillets, etc…

Ainsi, par une mesure des angles des rayons diffractés, il est possible de déterminer la famille argileuse voire l’argile à laquelle nous avons à faire !

L’argile et l’eau, une grande histoire d’amour…

Argile + eau = solution colloïdale

Penchons nous sur un aspect totalement chimique des argiles… Avez-vous déjà fait le test ?  Dans un récipient rempli d’eau, verser un petit peu d’argile en poudre et observez… Les particules d’argile se comportent comme des gouttes d’huile dans de l’eau : des micelles en suspension se forment et, vous verrez c’est très étonnant, elles se lient les unes aux autres telles un aimant ! C’est la présence de minéraux portant des charges négatives et positives qui provoque ces forces d’attraction et de répulsion. Ainsi, les particules d’argile s’agglomèrent naturellement mais la moindre petite agitation de l’eau modifie cet état et redisperse alors l’argile dans l’eau… On parle de solution colloïdale.

Collo quoi ? Un colloïde est une macromolécule ou un minéral qui, placé dans de l’eau, ne forme pas une solution comme c’est le cas lorsqu’on dissout du sucre dans l’eau par exemple, mais forme une suspension. Comment cela s’explique ? La taille des minéraux argileux est plus grande que celle des espaces vides laissés par les molécules d’eau (H2O)... Pendant que le sel ou le sucre arrivent à se faufiler dans ces “trous”, on parle de dissolution, les minéraux argileux eux n’en sont pas capables, on parle de dispersion.

Etat dispersé et état floculé

Allons plus loin dans notre vocabulaire… Lorsque les échanges de charges négatives et positives se stabilisent, les agrégats d’argile floculent. Je flocule, tu flocules, nous floculons… mais oui bien sûr ! La floculation correspond au dépôt d’argile se formant dans le fond mais qui est capable de se redisperser à nouveau en cas d’agitation.

Vous l’aurez compris, deux états de l’argile dans l’eau sont observés : l’état dispersé ou bien l’état floculé ! Ce sont deux états réversibles sauf conditions particulières… chaleur, dégradation, hydratation… Ces états expliquent notamment les différentes réactions du sol aux évènement climatiques. Lorsque les argiles sont floculées, elles apparaissent soudées, elles permettent ainsi aux particules du sol comme le sable de former des agrégats très résistants, même à de fortes pluies. Toutefois, si les argiles sont dispersées, il n’y a pas de “structure” des sols à proprement parlé… L’argile perd son rôle de “ciment” et le sol sera bouleversé et sensible à l’érosion et aux facteurs climatiques.

En conclusion, un sol trop gorgé d’eau désagglomèrera les argiles des autres éléments minéraux (sable, limons…). Le sol sera alors moins stable. Un sol trop sec au contraire peut créer des failles dans des sols argileux et donc le fragiliser aussi. Finalement, tout est une question d’é-qui-libre… La teneur souhaitable d’eau dans une terre idéalement constituée (sables 50 % + limons 30 % + argiles 15 % + humus 5 %) doit être autour des 15 % à 20 %.

L’argile c’est le ciment du… sol ! Le sol, le sol ok, mais vous le verrez par la suite, les propriétés colloïdales de l’argile expliquent ses étonnantes propriétés thérapeutiques… (le suspens est insoutenable..!)

Anneau de texture

Pour les terres argileuses, on peut estimer la teneur en argile en faisant un “anneau de texture”... Oui, oui, oui, vous ferez l’expérience. Prenez une boule de terre et malaxer pour en faire un boudin.

  1. Il tient ? Estimez que votre terre est composée à 10 % d’argiles.
  2. Il peut s’arrondir ? il y a 15 % d’argiles.
  3. Vous pouvez le refermer en anneau malgré quelques craquelures ? Les argiles sont présentes à près de 30 %.
  4. Dans un dernier cas, si l’anneau reste bien lisse, les argiles sont présentes à 50 % !

Les propriétés de l’argile

Vous vous souvenez plus haut on parlait de colloïde, d’eau et de propriétés de l’argile ? Dites moi ouiiiiiiii… Eh bien nous y venons ça y est ! Si l’argile ne peut se dissoudre dans l’eau, elle est capable de fixer l’eau par absorption, l’eau mais également un tas de choses en suspension…

Pouvoir aBsorbant des argiles

C’est l’un des plus importants pouvoirs de l’argile : son pouvoir absorbant ! L’absorption est un phénomène passif qui, à la manière d’un buvard ou d’une éponge, permet à l’argile d’absorber l’eau. Nous l’avons vu les argiles ne peuvent se dissoudre dans l’eau, leurs molécules étant trop grosses pour se faufiler dans les molécules d’eau… Cependant, l’eau elle, peut occuper les espaces disponibles dans les structures moléculaires argileuses !

Nous l’avons vu également plus haut, chaque type d’argile est constituée différemment. Ainsi, si on devait les classer, en tenant compte de leurs différentes structures, les montmorillonites auraient le plus fort pouvoir d'absorption, suivis des illites et enfin des kaolinites. 

Cette capacité d’absorption confère aux argiles un pouvoir justifiant son emploi dans de nombreux cataplasmes pour soigner des plaies en absorbant des liquides pathologiques comme le pus par exemple. Une autre utilisation est pratique dans une maison pour absorber des mauvaises odeurs.

Pour mieux visualiser la chose, imaginez une terre argileuse en train de se dessécher… elle craquelle ! Mais il suffit de rajouter un peu d’eau pour qu’elle retrouve son aspect lisse et malléable, comme c’est le cas pour le potier qui malaxe son matériau.

Pouvoir aDsorbant

Le phénomène d’aDsorption est différent de celui d’aBsorption. C’est un phénomène actif, il se manifeste par la captation de molécules sur des sites actifs ou bien par l’attraction existante entre des molécules chargées positivement (cations) et celles chargées négativement (anions).

Ainsi, les argiles sont capables de fixer à leur surface des substances et composés chimiques. Cela se calcule grâce à la capacité d'échange cationique des argiles (CEC). 

Par exemple, des études ont montré que les argiles attiraient des bactéries ou encore des toxines, prouvant tout leur intérêt lors de problèmes digestifs par exemple.

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Bibliographie

Publication : Hernot, F. (2006). L’argile, son utilisation à l'officine. http://dune.univ-angers.fr/fichiers/20073109/2016PPHA5426/fichier/5426F.pdf

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